un business angel au Maroc

Ce que l'on sait sur la petite communauté des Business Angels au Maroc

Avec des enjeux allant généralement de 50 000 à 1 million de dirhams par projet, les Business Angels sont le plus souvent des entrepreneurs ou des hommes d’affaires avides de risque. Ils investissent principalement dans les secteurs de la technologie, du numérique et des énergies propres.

Alors que l’écosystème startup peine à se développer au Maroc en raison notamment des difficultés d’accès au financement et à l’accompagnement, les Business Angels pourraient jouer un rôle clé. Ces personnes qui apportent du réseautage, du mentorat et de l’argent en échange d’une part du capital. Si cette source de financement est développée dans certains pays occidentaux, elle reste à la traîne au Maroc. L’activité des Business Angels reste méconnue et les motivations de ses acteurs mystérieuses. Tickets moyens investis, risques acceptables, secteurs d’activité privilégiés, effort d’accompagnement …, voici ce que l’on sait de leurs pratiques.

Un profil très entrepreneurial

Tout d’abord, sachez que la communauté des Business Angels au Maroc est très petite. Il n’y a pas de réseau national ni de chiffres précis, mais ces investisseurs sont très peu nombreux.

Jérôme Mouthon, président de French Tech Maroc, est l’un des Business Angels de l’écosystème marocain. Parmi les 12 membres actifs du Business Angels Club de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française du Maroc (CFCIM), il investit du temps et parfois de l’argent dans l’accompagnement de jeunes entreprises innovantes. Contacté par LeBoursier, il nous donne le profil des Business Angels avec lesquels il travaille. «Il s’agit généralement d’entrepreneurs ou de chefs d’entreprise. Il y a aussi de nombreux chefs d’entreprise entre 40 et 60 ans qui cherchent à investir et à soutenir une jeune entreprise. Il y a aussi des intrapreneurs, des personnes qui ont toujours rêvé d’être entrepreneur mais qui ont jamais fait dans leur vie professionnelle », explique Jérôme Mouthon.

Les Business Angels peuvent être loin du monde de la technologie et d’Internet. Certains capitaines d’industrie n’hésitent pas à investir dans des start-up innovantes, aux antipodes de leur domaine. Karim Tazi, administrateur du Groupe Richbond, nous livre sa vision de ces personnes qui décident de prendre des risques en soutenant des projets. «Il y a des capitaines d’industrie et aussi des gens qui réussissent dans le secteur des services. Ma vision est la suivante: Ceux qui ont construit leur groupe sur la base d’une idée entrepreneuriale et l’ont fait grandir dans ce sens restent toujours sensibles à la prise de risque. Ceux qui sont susceptibles d’être des Business Angels, ce sont les gens », décrit-il.

La motivation doit aller bien au-delà seulement du ROI. Au sein du CFCIM Business Angels Club, Jérôme Mouthon nous dit que « les sommes investies par Business Angel sont au maximum de 500 000 dirhams par tranches de 50 000 ou 100 000 ». De son côté, Karim Tazi nous dit que «dans le monde des business angels, les tickets peuvent atteindre 250 000, 500 000, maximum 1 million de dirhams». Des montants qui selon lui « ne permettent pas de faire fortune en tant que Business Angel » mais qui permettent d’avoir une relation humaine très enrichissante avec le porteur de projet.

Car au-delà du profit que l’investissement peut générer, c’est aussi l’accès à une autre vision du marché qui devient possible. «Il y a la partie coaching qui est une récompense très intéressante. De nombreuses entreprises numériques opèrent dans un secteur qui n’est pas vraiment le mien. Pour ma part, je suis le fruit d’une vision différente de l’économie. Ces jeunes porteurs de projets qui viennent chez nous, apportent une autre vision du monde et nous ouvrent les yeux sur les opportunités et la réalité d’un secteur d’avenir »confie Karim Tazi.

De son côté, William Simoncelli, fondateur de Carré Immobilier et Business Angel confie: «Les prévisions de ROI (retour sur investissement) sont naturellement importantes dans la prise de décision. L’aspect financier est d’un réel intérêt car ce sont nos indicateurs de performance. L’aventure doit être financièrement viable, mais c’est une condition nécessaire mais non suffisante. Il y a une transmission qui est nécessaire dans le don du savoir, du savoir et de l’expérience.  »

Mais dans la vie de Business Angel, accompagner les jeunes entreprises innovantes et les fonds mis à disposition ne sont pas synonymes de réussite. L’échec et la perte totale du pari restent monnaie courante. Pour Karim Tazi, le risque de casse est inhérent à l’environnement et l’investisseur doit accepter de perdre de l’argent. «Le risque est là par définition. Vous devez accepter la perte totale du pari. Si vous décidez d’investir dans une dizaine de startups en pariant 150 000 dirhams sur chacune, par exemple, vous devez accepter de perdre 50%, voire les deux tiers de ce que vous avez misé », précise l’administrateur de Richbond.

Un constat également partagé par Jérôme Mouthon qui explique de son côté que «60% des investissements réalisés n’ont abouti à rien». D’où la nécessité de diversifier son portefeuille d’investissements pour maximiser la garantie d’un rendement.

Chaque Business Angel a son secteur de prédilection dépendamment de son bagage professionnel. Généralement, les investissements sont dirigés essentiellement vers la technologie et le numérique. Il y a deux raisons pour cela. Premièrement, le potentiel de scalabilité des startups dans un secteur technologique. C’est à dire l’aptitude à grossir et générer du cash. «L’objectif c’est que la startup passe à l’échelle supérieure, et qu’à terme il y ait un potentiel de rachat par une plus grosse société ou que les fondateurs peuvent racheter les parts des Business Angels ou encore qu’ils être apte à payer des dividendes» détaille Jérôme Mouthon.

Deux éléments, cette industrie neuve et très compétitive n’est pas prisée par les circuits de financements traditionnels. «Quelqu’un qui monte sa startup aura plus tendance à aller voir un business angel que sa banque. Quelqu’un qui se situe sur une industrie plus traditionnelle aura probablement recours au secteur bancaire »explique Jérôme Mouthon.

Il poursuit, «Pour ma part, en tant que fondateur de Buzzeff Maroc, j’ai une appétence pour le web. C’est le secteur que je connais le mieux, donc un porteur de projet qui est un projet de crowdfunding ou de drop shipping, cela m’intéresse »explique Jérôme Mouthon. Idem pour William Simoncelli qui nous explique que les secteurs porteurs se situent dans les nouvelles technologies et les technologies propres. «Par exemple, il y a la nano irrigation pour l’agriculture. Il y a des ingénieurs agronomes qui ont des idées brillantes sur le sujet »explique-t-il.

Pour d’autres stratégies ne sont pas réellement établies. C’est le cas de Karim Tazi. «Nous traitons les projets qui se présentent à nous au cas par cas et nous ne faisons pas dans la spécialisation sur un secteur en particulier. Nous n’avons pas de vraies politiques dans ce domaine »explique l’administrateur de Richbond. Il continue, «ce qui nous intéresse c’est de contribuer à la création de richesse, culturelle ou économique».

Source : Le boursier – Media 24